Extrait du livre HUNDERTWASSER par Harry Rand.(page 160)

« Anticipant étrangement Hundertwasser, Auguste Rodin a dit un jour : « Ne croyez-vous pas que les plantes vertes soient le milieu le plus approprié pour les sculptures antiques ? Ne dirait-on pas que ce petit amour endormi est le dieu de ce jardin ? »

Je cite Hundertwasser :

« Les gens placent volontiers des nains dans leur jardin, sous des plantes ou de petits arbres, dans des massifs, sur de petites collines, et ils mettent à côté quelque chose d’autre, peut-être un animal plus petit, un lapin ou des personnages de contes et légendes. Cela ressemble à un autel. Cela ressemble fort au coin de recueillement avec le crucifix ou le bouddha oriental. La seule différence est qu’il se trouve dans le jardin. Mais tout le monde n’en a pas, seulement certains. Si on leur demande pourquoi, ils ne trouvent pas de réponse. Ma théorie est que le nain de jardin est une sorte de dieu, le dieu des temps anciens, qui a disparu, a peut-être même été anéanti par notre monothéisme. Le nain de jardin est la mauvaise conscience personnifiée de l’homme vis-à-vis de la nature. Quand les gens ont l’impression de faire tort à la nature, ils placent un nain de jardin pour s’excuser. Il est petit parce que l’herbe et les fleurs sont petites ; il est petit afin de mieux pouvoir parler avec les escargots, les animaux et les plantes. Nous ne savons plus leur parler. »

« Priape, le dieu de la fécondité, était le dieu des jardins, leur protecteur. Il ne faut pas beaucoup d’imagination pour comprendre le développement où le monde chrétien a opprimé cette divinité phallique et où un nain, auquel il manquait un pénis géant (donnant la vie) et qui est finalement le petit nain inoffensif,a pris la place où résidait auparavant un personnage sage et puissant. L’art explore complètement ses propres implications ; de cette façon, il nous entraîne en avant. »

Hundertwasser :

« Oui, le nain de jardin est un symbole de conte de fées. Les hommes ne peuvent vivre sans rêves. Il symbolise ce rêve. Il rêve le rêve que les hommes n’ont parfois pas le temps de rêver.
Les architectes le haïssent comme la peste. Pour un architecte rationnel, le nain de jardin est le pire ennemi. Le pire qu’on puisse lui faire est de l’inviter à dîner et de poser un nain de jardin sur la table. On chasse les vampires avec de l’ail et un crucifix, et les architectes avec un nain de jardin. »